“Mes filles m’ont dit : Vas-y, fonce !“
Myriam Borg-Korfanty le 1er décembre 2013 à Paris-Coubertin pour fêter les 10 ans du titre de championnes du monde.
Myriam, comment vivez-vous votre retour en LFH ?
Je le vis bien, je prends du plaisir même si physiquement, j’avoue que c’est encore un peu dur (sourires). Reprendre après 6 mois d’absence totale des terrains, à ce niveau, ce n’est pas simple. J’ai tout de suite été dans le vif du sujet. En janvier, le calendrier est chargé. En fait cette reprise, depuis les premiers entraînements, je la vis un peu comme un sprint.
Ma principale crainte, c’était vraiment au niveau physique. Je ne voulais pas revenir pour revenir, il fallait que je puisse apporter un minimum à l’équipe. Et donc pouvoir avancer sur le terrain, suivre le rythme. C’est de mieux en mieux, on s’accroche (sourires). Au niveau handball, du jeu, et même du club, j’étais plutôt confiante. J’ai été très bien accueillie de part et d’autre.
Qui vous a demandé de revenir, comment cela s’est-il passé ?
C’est un coup de téléphone du président Bernard Coly. On se connaît bien et un jour, il m’appelle, me propose de revenir. J’ai cru à un gag, c’était début janvier, je lui réponds : “Merci Bernard, je te souhaite une bonne année à toi aussi ! ». Il me dit que ce n’est pas une blague. J’étais surprise et puis ensuite, forcément, c’est quelque chose qui ne laisse pas indifférent. Faire partie des débuts de cette Union, c’est forcément un challenge intéressant, on se dit “pourquoi pas ?“
Avez-vous dit oui tout de suite ?
Non car je n’ai pas pris la décision toute seule. J’ai fait une petite réunion de famille pour demander à mes enfants, mon mari, si jamais je reprenais, si ça ne les embêtait pas. Mes filles m’ont dit : “Vas-y, fonce !“. Le petit a 3 ans, il ne comprend pas tout encore, mais qu’il ne s’inquiète pas, il n’en aura que pour 6 mois…(sourires). Les filles, mes jumelles qui ont 8 ans, étaient très contentes.
2 championnes du monde (2013, 2003) à l’entraînement de l’UMB-B (©UMB-B).
Vos filles jouent-elles au handball ?
Elles font de la gym et du handball. Je crois qu’avec mon mari (il évolue en N2 à Lormont, ndlr), on leur a déjà transmis la maladie du handball (sourires). Elles jouent à Mios Biganos, j’habite toujours à Mios. Elles aiment me suivre, venir aux matches, être avec l’équipe. Ça leur plaît.
Vous avez joué plus de 20 ans à Mios (1986-2000, 2003-2012), une saison à Bègles (2012-2013). Etiez-vous déçue de ne pas faire partie du projet UMB-B dès cet été ?
Sur le fond, je peux comprendre, je ne suis plus toute jeune. C’est plus la manière que je n’avais pas trop comprise. Je n’ai pas de rancoeur ou autre, et c’est l’envie de faire partie de ce projet qui m’a poussée à revenir. C’est un challenge qui me tient à coeur et si l’on fait appel à moi, je veux répondre présente. Aussi, j’ai une petite fierté personnelle qui fait que je ne veux pas être ridicule et j’ai envie d’apporter quelque chose.
Pour votre 1er match, le 15 janvier face à Issy Paris, à Duhourquet (26-26, J12). Qu’avez-vous ressenti ?
Ma seule “crainte“, c’était le manque de repères avec mes coéquipières. Sinon, ça n’était que du plaisir. Je n’avais pas de stress ni de pression particulière. Le public m’a super bien accueillie, ça fait toujours chaud au coeur. C’était un match à enjeu, face à une grosse équipe, mais je n’avais pas de pression négative, je n’en n’ai jamais vraiment eue durant ma carrière alors ce n’est pas aujourd’hui que ça va changer (sourires). Le seul truc est que je ne voulais pas être un poids pour l’équipe !
2 championnes du monde également sur cette photo, toujours en activité en LFH.
Outre celui des parquets, vous avez également retrouvé le chemin des filets (3/3, 100%) ?
Oui le coach a été gentil de me laisser tirer les penalties pour me redonner confiance, j’en suis quand même reconnaissante (sourires). Après, si je les avais ratés, ç’aurait été moins agréable. Mais tout s’est plutôt bien passé. Ça n’était que du plaisir. J’ai joué à Mios, à Bègles et pour mon 1er match avec l’Union, j’étais contente et j’ai eu de bonnes sensations.
Peut-être aussi quelques courbatures ?
J’en avais déjà avant le match… Les 2 premières semaines à l’entraînement, c’était la totale : ampoules au pied, courbatures, les petits tracas pendant 15 jours, mais c’est le lot de toute préparation. A un moment, il faut souffrir, il faut inévitablement en passer par là. D’ailleurs, je continue de serrer les dents car pour suivre aux entraînements, ce n’est pas tous les jours facile !
On s’accroche et je pense que d’ici un mois, j’aurai à peu près rattrapé mon retard. Le haut niveau nécessite vraiment d’être au top physiquement. Mais j’ai quand même de bonnes sensations et j’essaie d’apporter autre chose que ma vitesse de pointe pour l’instant (sourires).
3 victoires, 1 match nul, 1 défaite toutes compétitions confondues, l’UMB-B début bien l’année et est invaincu en championnat en 2014.
Oui cela facilite aussi mon arrivée, l’ambiance est bonne et les résultats ne sont pas trop mal, donc tout est fait pour que cela se passe bien. J’avais peur d’être le chat noir, je me disais : “Si j’arrive et que je suis le chat noir“ (sourires). C’est plutôt bien pour l’instant et pourvu que ça dure.
Face à Nice le 29 janvier (31-28), vous avez également rejoué dans “votre“ Chaudron de Biganos ?
C’était particulier car en 2012, je croyais y avoir disputé mon dernier match. Le fait de revenir avec l’UMB-B, pour moi qui ai joué dans les 2 parties de cette Union, c’était un moment assez fort et particulier. J’ai quasiment été bercée dans ce Chaudron, ce sont beaucoup de souvenirs. Et donc le fait d’y rejouer dans ces conditions, ce n’était pas du stress mais un beau pincement au cœur. Ce petit chaudron, ça fait plaisir de le retrouver et je crois que l’on a encore quelques matches à y jouer cette saison, c’est bien.
Myriam Borg-Korfanty a porté durant plus de 20 saisons les couleurs miossaises.
Comment est-ce que l’on s’organise lorsqu’on est maman de 3 enfants, que l’on travaille (adjoint administratif au domaine d’Hostens) et que l’on joue en LFH ?
Le début d’année a été assez compliqué car je travaillais à 80%. Pour pouvoir tout concilier, cela demande un petit temps d’adaptation. Mais j’ai la chance d’avoir de supers collègues, un patron très bien qui m’a dit : “Je te suis, pas de souci“ et qui m’a lâchée très vite pour que je puisse m’entraîner. Je travaille désormais à 50% pour pouvoir m’entraîner 2 matinées par semaine avec les filles. Sinon, je m’entraîne tous les soirs avec elles.
La plus grosse organisation, c’est sûrement la famille, les enfants à gérer en fonction des entraînements, surtout des déplacements. Heureusement que papi et mamie sont là. Pour l’instant, ça se passe assez bien.
En Coupe d’Europe, vous voici quasiment qualifié en 1/4 de finale ?
Jouer la Coupe d’Europe, c’est toujours agréable. Quand Mios l’a gagnée (2011), c’était lors de ma 2è grossesse mais je l’avais vécu à fond avec les filles. Pour l’instant, on ne pense pas trophée ou finale, en tout cas moi je prends vraiment match après match. Le tirage est tellement aléatoire.
En Suisse, notre adversaire (Bâle) était constitué de pas mal de jeunes, qui ne sont pas professionnelles et qui s’entraînent quand elles le peuvent. Elles se sont bien battues, mais on voit la différence avec des filles dont c’est le métier et qui s’entraînent 2 fois par jour. Ce genre de match nous permet d’engranger de la confiance.
165 sélections en équipe de France.
Le but dans ce genre de rencontres, c’est de se faire faire plaisir et faire plaisir aux supporters. Quand on tombe sur des équipes plus faibles, on peut perdre notre handball. Mais autant jouer 1h en se faisant plaisir et en respectant l’adversaire et le public. D’ailleurs, je tiens à remercier les supporters de l’UMB-B qui sont venus en Suisse. Et à samedi à La Teste, j’espère que ce sera une belle soirée.
Le niveau de LFH a-t-il changé ?
Alors c’est soit le niveau qui a changé, soit que j’ai pris un sacré coup de vieux ! Ce qui a le plus évolué, je trouve, c’est le rythme de jeu, l’intensité. Tu sens que les filles ont vraiment besoin d’être à 100%. Le jeu en lui-même est beaucoup plus rapide et fluide. Entre défenses et montées de balle, les transitions ont évolué, elles sont beaucoup plus rapides. C’est tellement compliqué de marquer des buts que l’on va plus vite de l’avant, on court davantage.
Donc j’ai vraiment l’impression que tout va plus vite mais ça vient peut-être de moi aussi (sourires). Les filles ont 10 ans de moins pour la plupart et même plus. Cela me fait une deuxième jeunesse !
Quel est le meilleur moment, jusqu’ici, de votre riche carrière ?
En club, les premiers pas en Coupe d’Europe avec Mios, la saison 1997-1998 avec Domi Mayonnade. C’était un grand moment, la 1ère participation de Mios en Coupe d’Europe, avec tous les gens qui nous suivaient, qui venaient nous attendre à la gare, etc. C’était un moment fort avec l’équipe, les supporters, toute la ville. Et même si on n’est allé “que“ jusqu’en quarts, c’était très fort en émotions.
Avec l’équipe de France, le titre de championnes du monde (2003), le scénario de la finale et on s’était battues tellement d’années pour décrocher cette médaille, que de l’avoir autour du cou, c’était comme une consécration.
Myriam Borg-Korfanty
Née le 8 octobre 1978 à Pessac 35 ans, Arrière gauche
Clubs : Mios Biganos (1986-2000), Mérignac (2000-2003), Mios Biganos (2003-2012) Bègles (2012-2013), Union Mios Biganos – Bègles (2012-2014)
Equipe de France : Championne du Monde (2003), médaille de bronze à l’Euro (2002), 2 participations aux Jeux Olympiques (Sydney 2000, Athènes 2004)