Besançon, la belle surprise
Entraide, cohésion, dépassement de soi. Des valeurs sur lesquelles s’appuie le coach de l’ESBF.
Camille Comte, vous êtes-vous remis de vos émotions de samedi soir ?
(Sourires) Oui, nous nous sommes déjà remis au travail. Mais je suis très satisfait du résultat, forcément. Quand j’ai vu les filles exploser de joie, leur attitude pendant le match, leur engagement, sincèrement cela fait plaisir. Nous nous battons avec nos armes pour donner le maximum. Avec la victoire au bout, c’est encore mieux. Le public nous a soutenus, tout le monde était content après le match.
Je crois que l’on fait aussi ce métier pour vivre et procurer des émotions. Par rapport à cela, j’étais comblé de bonheur (sourires) même si l’on doit encore beaucoup travailler. J’ai aimé l’enthousiasme de mes joueuses, ce qu’elles ont transmis au public. C’est cela qui nous permet de l’emporter samedi. Car dans le contenu du match, j’ai revu la vidéo, et c’est loin d’être parfait.
Est-ce une victoire qui s’inscrit dans l’esprit ‘commando’ de votre préparation ?
Totalement. Nous savons pertinemment que notre saison sera jalonnée de difficultés. Par rapport à cela, nous avons construit cette équipe pour relever des défis, rester soudés, ne jamais rien lâcher. Ce que j’ai vu samedi s’inscrit dans cet état d’esprit. Cette victoire, c’est un premier défi que nous avons relevé.
Est-ce une surprise de gagner si tôt dans la saison ?
Par rapport à nos “prévisions“, oui, même si nous jouons toujours avec la volonté de gagner. Nous avons édicté une feuille de route, sur laquelle nous pensons être plus performants en 2è partie de championnat. Entre les blessées, les nouvelles joueuses, l’équipe a besoin de temps pour se construire. Nous savions aussi qu’il y aurait des matches abordables pour nous et d’autres que nous pourrions rendre abordables, en faisant douter nos adversaires.
C’est la clé du match samedi. Toulon St-Cyr est une très belle équipe, je ne m’en fais pas pour eux. Nous avons su les mettre en difficulté dès le début de la rencontre. Elles ont buté sur notre gardienne (Catherine Gabriel). Il fallait tenir pendant 60 minutes, nous l’avons fait. En défense, les filles ont aussi facilité le travail de Cathy. C’est une belle satisfaction.
Peut-on parler de match référence pour l’ESBF ?
Au niveau de l’envie, oui. Pas encore au niveau du jeu. Depuis notre stage de cohésion militaire (avec le 19è Régiment de Génie de Besançon, ndlr), le groupe est très réceptif et cela porte ses fruits. Les joueuses ont envie de travailler pour l’équipe. A chaque arrêt de notre gardienne, toutes les filles du banc se levaient, à chaque but, pareil. On se félicite, on s’encourage, on se soutient. Cette solidarité fait partie de notre identité.
Avez-vous changé quelque chose après votre défaite de 18 buts (42-24) à Metz le week-end dernier ?
Pas spécialement. Ma réponse va peut-être vous surprendre mais je n’ai pas vu tant de différences entre nos 2 matches. A Metz, j’ai trouvé que les filles n’avaient jamais abandonné. Elles ont toujours joué, elles sont allées de l’avant. L’adversaire (Metz) était trop fort pour nous, mais dans la cohésion, déjà, nous étions dans le vrai. Pour moi, ce match face à Toulon St-Cyr s’inscrit dans la continuité de celui de Metz. Sur le comportement, l’envie de jouer, nous ne voulons pas nous laisser abattre.
Camille Comte, ici au côté des 9 autres entraîneurs de LFH.
Lors de la Conférence de Presse de rentrée de la LFH (3 septembre, Hôtel de Ville de Paris) vous vous êtes présenté comme le petit poucet du championnat.
Oui, ce n’est pas la victoire de samedi qui va nous faire changer de statut. Nous sommes toujours le petit poucet, c’est vraiment notre place. Par contre, la moindre petite chance, le moindre petit défi qui s’offrira à nous, nous l’aborderons avec le même état d’esprit, beaucoup d’engagement et d’envie.
Natalia Vasileuskaya, votre recrue biélorusse, inscrit le penalty victorieux et termine meilleure buteuse de la rencontre (7 buts). Vous y attendiez-vous ?
Natalia (prononcez Natacha) est une toute jeune joueuse, elle est née en 1991, mais elle est déjà très déterminée. Sur le terrain, elle court tout le temps, elle n’a pas tremblé au moment de tirer le penalty décisif. Elle possède une expérience suffisante pour aborder un match de D1 serré.
C’est une joueuse peu connue du grand public. Comment l’avez-vous détectée, recrutée ?
C’est vrai qu’elle n’est pas connue. Son profil d’arrière m’intéressait. Je ne vous cache pas qu’il n’est pas simple de trouver des vidéos du championnat belarus (sourires). Mais grâce à la modernité, aux nouvelles technologies, Youtube, etc, en cherchant un peu, on arrive presque toujours à retrouver des matches à peu près partout où une caméra se trouve, même des vidéo “amateur“.
J’ai donc vu quelques vidéos sur Internet, j’ai vu ses statistiques (Natalia Vasileuskaya évoluait à Gorodnichanka, BLR, ndlr). Les contacts avec les agents m’ont permis d’avancer sur le dossier.
Et ensuite ?
Une fois que j’avais repéré la joueuse, cela a pris un peu de temps. La Biélorussie n’est pas le pays le plus ouvert. Donc c’était un peu long, notamment pour les papiers administratifs. Natalia nous a rejoints assez tard pendant la préparation. Et puis, hormis quelques matches de Coupe d’Europe, en Espagne, je crois qu’elle n’a jamais quitté son pays. En tout cas, c’est la 1ère fois qu’elle déménage. Il faut qu’elle apprenne la culture française. Beaucoup de choses sont nouvelles et différentes pour elle.
Justement, comment s’est-elle adaptée ?
Cela se fait doucement, mais sûrement. Il y a un temps d’adaptation incontournable. Parfois, Natalia est étonnée de la façon dont nous travaillons. Ce n’est pas évident pour elle. Mais elle a vraiment une volonté à toute épreuve. Cela s’est ressenti dans son match de samedi. Elle n’a pas fait d’action spectaculaire mais le moindre ballon qui traînait, elle était dessus. Elle est extrêmement déterminée.
Aujourd’hui, elle commence à comprendre notre jeu. Je pense qu’elle a une grosse marge de progression. Il y a aussi la barrière de la langue. Car Natalia ne parle ni français, ni anglais. C’est un peu compliqué, on communique par gestes, par schémas. Avec Sladjana (Pop-Lazic, capitaine de l’ESBF, internationale serbe), elles peuvent davantage parler. Dans l’entourage du club, elle a pu rencontrer une personne russe, c’est important pour elle car le changement est important.
Comment aborder le déplacement de vendredi au Havre, co-leader du championnat ?
Je vais avoir un discours classique… Le HAC est une équipe très solide, qui tourne bien. Physiquement, c’est fort, c’est une équipe qui défend bien avec de bonnes bases collectivement. Quel que soit le score, nous continuerons à aller de l’avant, on ne veut pas abdiquer.
Nous avons décroché une 1ère victoire, c’est bon pour la confiance. Mais il ne faut surtout pas s’emballer, nous ne devons surtout pas changer nos objectifs. Nous restons sur notre feuille de route, avec beaucoup d’humilité. Car il y aura des moments plus délicats, et nous le savons.