Squad LFH – Claude Mirtillo : « Transmettre un état d’esprit qui est important à mes yeux ! »
Dans le cadre du dispositif Squad LFH, qui a pour but de mettre en lumière tour à tour les 12 clubs de la Ligue Féminine de Handball, focus cette semaine sur l’OGC Nice Côte d’Azur Handball. Entretien avec Claude Mirtillo, entraîneur adjoint des Aiglonnes, et personnage du handball niçois, qui a passé de nombreuses années dans le club masculin de sa ville natale, avant de rejoindre l’OGCN en 2015.
Vous avez passé l’intégralité de votre carrière à Nice, d’abord dans le club masculin pendant de nombreuses années, avant de rejoindre l’OGC Nice en 2015 en provenance du Cavigal. Pouvez-vous nous en dire plus sur votre attachement à votre région.
Je suis natif de Nice, on se trouve dans l’appendice de la France, un peu loin de tout, et comme beaucoup de Niçois, je suis très attaché à ma région. C’est parfois difficile de s’expatrier, j’ai voyagé pourtant, mais pour mon plaisir. J’ai toujours trouvé mon compte ici, j’ai été le gardien de Nice en deuxième division dans les années 70-80, à une époque ou le handball était complètement amateur. Quand j’ai arrêté de jouer, j’étais le capitaine, l’ancien, je ne pensais pas forcément avoir la vocation d’être entraîneur, mais pour aider le club, j’ai bien voulu dépanner pendant un an. Et puis comme Obélix, je suis tombé dans la marmite et j’ai continué et je suis resté !
Comment s’est passée votre arrivée à l’OGC Nice, après avoir passé votre carrière dans le secteur masculin ?
Dans mes dernières années avec le Cavigal, il n’était plus question de haut niveau. Nous étions impliqués socialement dans un quartier difficile, et nous avions décidé de rester en troisième division, en nous consacrant à la formation et au social. Cela valait ce que ça valait, mais c’était un club sain, qui dépendait en grande partie des collectivités locales. D’entraîneur, je suis devenu éducateur social, et c’est quelque chose qui me plaisait. Quand les dirigeants de l’OGC Nice m’ont contacté pour me demander un petit peu mon analyse sur le club, ils étaient déjà en LFH depuis quatre ans, et malgré les arrivées de grandes joueuses comme Alexandra Lacrabère, Cléopatre Darleux, l’amalgame ne se faisait pas. Quand je suis arrivé, la première remarque que j’ai eu, c’est de dire : sur le mur de la salle il y a écrit « fières d’être niçoises » et il n’y a pas de Niçoises dans l’équipe. Le centre de formation marchait très bien, et il manquait ce lien entre les deux équipes. C’est ce qui m’a poussé à venir, cette volonté de pouvoir intégrer les jeunes dans le projet. C’est ce que j’avais fait chez les garçons pendant des années, et ils ont cru en moi.
Aujourd’hui, le nouveau projet porte ses fruits, avec des jeunes impliquées, encadrées par des joueuses expérimentées et des résultats positifs à la clé. Comment analysez-vous cela ?
On récolte le fruit de notre travail, et du projet qui a été mis en place il y a trois ans. Je suis allé chercher Marjan (Kolev) à St Egrève, et nous avons tout reconstruit en allant chercher des joueuses qui n’étaient pas forcément reconnues au plus haut niveau, comme Ehsan Abdelmalek, Hatadou Sako, Noémie Lachaud... Quand je suis arrivé en 2015, avec Sébastien Gardillou, je découvrais le handball féminin, et je peux vous dire que j’ai passé beaucoup de temps devant des vidéos, pour pouvoir identifier les joueuses. Quand le club a décidé de partir sur un nouveau projet, j’ai eu la possibilité de faire venir ces joueuses que j’avais ciblé et cela a fonctionné.
Nice occupe actuellement la troisième place de la phase régulière et se trouve dans une très bonne dynamique avant d’accueillir Metz la semaine prochaine. Quel est l’état d’esprit actuel de votre équipe ?
Nice n’est pas une ville sportive dans l’âme, on est un petit Paris en quelque sorte, et c’est difficile d’attirer du public. Nous n’avons pas encore de Palais des Sports à Nice, alors qu’il y en a un peu partout en France… Malgré cela, on commence à sentir un engouement autour de nos performances. La venue de Metz mercredi prochain va attirer du monde c’est certain. Battre Metz serait magnifique, mais à nous de ne pas nous enflammer. Il faut rester logique, on reste un concurrent crédible pour Metz, et connaissant les valeurs de ce club, elles ne vont pas venir chez nous pour nous faire des cadeaux. Il ne faudrait pas faire les mêmes erreurs que la saison dernière, en perdant des joueuses sur ce match. Nous allons tout faire pour gagner devant notre public c’est évident, mais il y aura d’autres matchs très importants après en Coupe de France et en championnat. Nous avions pas mal de filles en tribunes contre Toulon, pas pour des blessures graves, mais cette année nous avons étoffé le staff médical, et nous ne voulons pas prendre de risques. L’objectif est d’arriver dans de bonnes dispositions en Playoffs, contrairement à la saison dernière, et cela passe par une bonne gestion de l’effectif. Si la phase régulière s’arrêtait aujourd’hui, nous serions face au Fleury Loiret en 1/4 de finale, équipe que nous avons battu à l’extérieur, et qui nous a battu chez nous donc vous voyez… Toutes les équipes sont dangereuses dans ce championnat. Maintenant nous sommes sur une bonne dynamique, et nous restons optimistes pour la suite.
Décrocher une qualification européenne pour la saison prochaine est l’objectif principal de cette fin de saison ?
Ce serait le Graal un petit peu pour tout le monde. Pour les filles évidemment, elles se battent sur chaque match ! 80% de nos joueuses n’ont jamais joué une coupe d’Europe, donc pour les jeunes du club, c’est essentiel. Pour le club ce serait une première, et puis la ville de Nice attend ça depuis 40 ans, qu’un club indoor arrive à décrocher une place sur la scène européenne. L’équipe de basket y était parvenue dans les années 70, ça remonte ! C’est quelque chose de très attendu, et j’espère que nous allons y arriver. Après, nous sommes conscients qu’une qualification européenne va engendrer beaucoup de travail derrière. Au niveau structure, nous ne pouvons pas rivaliser avec certains clubs. Notre budget est le 6 ou le 7e de LFH, nous ne sommes pas à la hauteur de Toulon, encore moins de Metz ou de Brest. Il va falloir continuer notre structuration sur tous les plans, humains et financiers, et ce n’est pas la moindre des choses. L’économie niçoise est essentiellement tournée vers le tourisme, et la difficulté est de trouver des partenaires. Nous avons la chance d’avoir un président comme Ange Ferracci qui est un homme d’affaire remarquable sur la région niçoise, et qui arrive à faire vivre le handball féminin, mais viser plus haut ce n’est pas facile. L’enjeu est de parvenir à faire cohabiter une aventure européenne, avec la pérennisation du club au plus haut niveau, autour d’un budget un peu plus conséquent.
On peut voir que vous êtes proches de vos joueuses. Cette relation est importante pour vous ?
Je me suis construit dans les années 70-80, avec le sport amateur, à une période où celui qui gagnait de l’argent en faisant du sport était privé des Jeux Olympiques. Le sport a beaucoup évolué depuis, mais de mon côté je souhaite transmettre l’état d’esprit qui est important à mes yeux. Au-delà des résultats sportifs, mon plus grand plaisir depuis mon arrivée à l’OGC Nice, est d’être reconnu par de grandes joueuses, comme une personne qui donne tout pour ce sport. Pour un ancien comme moi, cela n’a pas de prix. Modestement, je veux transmettre cette passion que je peux avoir pour le handball. L’argent arrive dans notre sport, chez les garçons cela fait quelques années maintenant, mais chez les filles c’est plutôt récent. Et même si nous sommes loin du foot, on peut voir des comportements qui commencent à être « particuliers ». A Nice, j’ai rompu les lignes, qu’on soit une joueuse comme Linnea Torstenson, ou bien une jeune joueuse, tout le monde est à la même enseigne. Et c’est vrai que de ce côté, Linnea et Carmen (Martin) m’ont beaucoup apporté depuis leur arrivée. Ce sont des joueuses qui ont tout gagné, et qui arrivent à se comporter de manière extraordinairement professionnelle. Dans les propos que je tiens et que j’avance, elles viennent valider mon message, et les références dans le handball féminin ce sont elles, pas moi. Le fait d’avoir été adopté par le handball féminin, c’est une grande fierté pour moi.