Thierry Weizman : “Un grand bonheur d’être dans le Top 12“
L’entraîneur du Metz HB Jérémy Roussel, la capitaine Nina Kanto, et le président Thierry Weizman.
Thierry Weizman, comment avez-vous vécu la qualification pour le Top 12 européen ?
Ce fut un grand moment de bonheur. C’est une qualification méritée je pense, notamment suite à notre défaite d’un but à domicile face à Larvik (25-26), ancien champion d’Europe (2011). Nous étions très déçus après ce match, nous sommes passés si près… Donc j’étais vraiment content que l’on aille rattraper le coup à Baia Mare (Roumanie).
Les filles ont arraché la qualification dans une ambiance hostile, et sans Kristina Liscevic, suspendue. C’est une fierté d’intégrer ce top 12, et l’on espère représenter au mieux le handball féminin français.
De belles affiches sont à venir aux Arènes ?
Nous allons recevoir le double vainqueur de la Ligue des champions (C1) Györ, le vainqueur de la Coupe des Coupes (C2) Viborg, le champion de Suède Savehöf. Trois affiches extraordinaires, avec le gratin du handball mondial qui sera à Metz. C’est un grand plaisir pour le club. Mathématiquement, la qualification pour les ¼ de finale est possible*. Après, il faudra le prouver sur le terrain.
Györ, double champion d’Europe en titre, bientôt aux Arènes.
Visez-vous de nouveaux records d’affluence ?
Nous espérons de belles fêtes dans notre salle. L’affluence du public, c’est une particularité à Metz qui nous tient à cœur. Nous avons la plus grosse affluence du handball féminin en Europe sur une saison, aujourd’hui la plus grosse affluence en Ligue des Champions (12 904 sur le 1er tour, ndlr). Nous souhaitons que cela dure, et nous travaillons en ce sens.
Cette saison, nous sommes en moyenne à 4 200 spectateurs en Ligue des Champions, 3 200 en Championnat, sachant que parfois, il y a 2 affiches dans la même semaine, les gens doivent faire un choix. Nous avons 1 761 abonnés à l’année, ce qui est énorme. Metz Handball n’est plus seulement un club de sport, nous sommes devenus une entreprise de spectacle.
C’est à dire ?
Nous sommes véritablement devenus une entreprise de spectacle, organisée et structurée comme telle. Pour certains matches de Coupe d’Europe, il m’est arrivé de faire 160 fiches de paie (service, restauration, buvette, boutique…). Il faut qu’il se passe quelque chose aux Arènes, du début à la fin de la soirée, ou de l’après-midi. Cela commence dès le hall d’entrée, quand les gens arrivent dans la salle. Nous proposons des Pack VIP (Argent, Or, Business Club, salon privé, etc ) avec des possibilités de restauration avant, pendant, après le match.
Les animations à la mi-temps sont indispensables, comme dernièrement les tambours du Bronx. Les gens viennent passer une soirée, comment on irait au théâtre, en allant dîner avant ou après la pièce. Là, tout se passe aux Arènes. On vend aujourd’hui des places pour des matches 100-120 euros pour l’ensemble (repas+match), avec traiteur haut de gamme (foie gras, champagne). Nous commercialisons ainsi jusqu’à 800 repas par soir. Un mauvais résultat ne fait jamais plaisir, mais même après une défaite, on veut que le public ait passé une belle soirée aux Arènes.
Les Dragonnes main dans la main avec leurs supporters.
Où en est le projet d’agrandissement de votre salle ?
Pour ces 3 matches de Ligue des champions, nous allons essayer de monter à 5 000 places. Actuellement, la capacité est de 4 400, pour monter à 5000, nous projetons d’installer des tribunes qui vont épouser la forme des Arènes. J’ai déjà beaucoup de demandes de places, on s’attend à un afflux maximum. Cela devrait se jouer à guichets fermés.
Quel bilan sportif tirez-vous à la trêve ?
Je suis très satisfait de la Coupe d’Europe, puisque l’objectif est atteint. En championnat, le but c’est de jouer les Play-Offs, si possible en intégrant les 2 premières places pour éviter les ¼ de finale. Nous restons dans les temps, nous avons fait un faux pas à Dijon (Dijon 25-24 Metz, J7). Jouer tous les 2 jours, quand vous êtes l’équipe à battre, on y laisse parfois des plumes. Mais ce championnat est extraordinaire, tout le monde peut perdre contre tout le monde.
Comment se passe les 1ers mois avec Jérémy Roussel ?
On est enchanté. Souvent, je me fais brancher par les copains sur le fait que je change souvent d’entraîneur (sourires). Mais cela suit une logique bien établie : nous avons beaucoup d’internationales, et avec un groupe relativement stable, nous avons besoin de leur apporter de la nouveauté, une nouvelle culture.
En LFH, nous jouons les mêmes adversaires d’une année sur l’autre, avec les mêmes trajets, les mêmes salles, donc si en plus, ce sont les mêmes entraînements, la même façon de jouer… C’est comme si on redoublait une classe, et pour continuer à avancer, on amène un nouvel enseignant, un nouveau programme, pour éviter que l’on ronronne de trop. Par rapport à cela, Jérémy a apporté beaucoup de nouveauté.
1ère saison en LFH pour Jérémy Roussel, en provenance de LNH.
Quoi, par exemple ?
Au niveau de la défense (1-2-3), de l’attaque, des nouveautés dans les entraînements, qui me satisfont pleinement. En plus, c’est un entraineur qui nous apporte la rigueur, le professionnalisme du handball masculin. Il est dévoué corps et âme au club. Je peux le joindre jour et nuit, je crois qu’on s’appelle à peu près 20 fois par jour. Nous sommes vraiment en phase.
Cela n’enlève rien au fait que j’ai adoré travaillé avec Sandor Rac, Sébastien Gardillou, et chaque entraineur du Metz HB. Mais j’aime les nouvelles aventures. Je trouve cela passionnant.
Côté joueuses, vous avez récemment prolongé Ana Gros (2 ans), Aily Luciano (1 an) ?
Ana Gros a franchi un cap avec Jérémy Roussel, tout comme Grâce Zaadi, Laura Glauser, Yvette Broch, des joueuses sur lesquelles on travaille actuellement pour renouveler leurs contrats. Nous travaillons déjà sur la saison prochaine. J’espère conclure une grande arrière internationale pour 2015-2016.
L’arrivée d’un joker médical serait également imminente ?
Oui, une demi-centre, arrière gauche. Le dossier est très avancé et j’espère pouvoir l’annoncer rapidement. Grâce Zaadi va se faire opérer du poignet après l’Euro, Tamara Horacek s’est rompue les ligaments du genou. Ce joker que nous souhaitons faire venir est une internationale étrangère, qui ne pourra pas jouer la Ligue des Champions, car elle l’a déjà joué avec son club cette saison.
Quels sont les objectifs de Metz cette saison ?
Ils sont très compliqués à déterminer, d’abord car nous avons un nouvel entraineur, qui apprend le handball féminin, même s’il s’acclimate très vite.
Et puis comme je le disais, c’est un championnat extraordinaire. Impossible, à ce jour, de dire qui sera champion. Pendant 3 mois, nous allons jouer toutes les compétitions (Ligue des Champions, Championnat, Coupe de la Ligue, Coupe de France), on verra ce que cela va donner. Metz Handball se doit de gagner chaque année le titre.
Laura Glauser bientôt prolongée ?
Aujourd’hui, être finaliste ou vice-champion, cela ne représente “rien“. J’entends par là que les gens à Metz veulent des titres, et puis c’est tout. Nous nous n’avons pas les moyens de grosses écuries européennes, mais nous donnerons toujours tout, jusqu’au bout. L’objectif majeur reste le championnat, pour pouvoir jouer la Ligue des Champions la saison prochaine.
Metz aime surprendre en dehors du terrain, quel sera votre prochain coup de com’?
La prochaine idée, elle est très avancée, mais c’est une surprise, qui on l’espère fera parler de nous à nouveau. Metz a fait le buzz à différentes périodes. C’est très important pour nos partenaires, de faire parler du club. Même si nous sommes le club le plus titré de France avec le Stade Toulousain, on parle moins de nous.
Alors nous essayons de trouver des idées. L’an dernier, les fèves à l’effigie des joueuses ont été vendues dans le monde entier, des collectionneurs en Chine nous en ont commandé ! Les Robes de Mariée l’année du mariage pour tous, le défilé Courrèges (notre photo), la bâche géante de 77 m à l’effigie des joueuses, du staff, l’hymne du club…
Défilé Courrèges, en septembre dernier.
Quelle est votre plus grande réussite à ce sujet ?
Les jupettes, sans hésiter. Quand on recrute des internationales aujourd’hui, ou quand on voyage, lors des tirages au sort, en Coupe d’Europe, tout le monde connaît et identifie Metz. C’est en partie grâce aux jupettes. Nous sommes la “team in skirt“, tout le monde nous appelle comme ça. C’est notre marque de fabrique, notre notoriété à l’étranger a bondi depuis 2011. En Coupe d’Europe, c’est souvent Metz qui fait les meilleures affluences des clubs, à domicile. Nous suscitons la curiosité.
Je sais que Györ a déjà pensé adopter les jupettes. Aujourd’hui, nos joueuses sont très heureuses de jouer en jupettes, et je précise qu’il s’agit de jupes short. En 2011, j’avais émis cette idée après avoir vu que dans les sports les plus médiatisés aux Etats-Unis, le tennis, le golf, le hockey sur gazon en Grande-Bretagne, les athlètes jouaient en jupette. Les joueuses m’ont ensuite donné leur feu vert et on est parti là-dessus.
Des joueuses ont-elles déjà refusé de jouer à Metz à cause de la jupette ?
Nous n’avons jamais eu de refus, au contraire. Pour prendre un exemple récent, Ana Gros, arrivée l’an dernier, était enchantée de pouvoir jouer en jupette. Nous en sommes très fiers, nous ne ferons pas marche arrière. De temps en temps, il y a des combats d’arrière garde, que je ne partage pas. Nous ne ferons jamais de calendrier dénudé ou en lingerie, ce n’est pas dans nos valeurs. Nous voulons être irréprochables sur ce plan.
Comment voyez-vous la 2è partie du championnat ?
Serrée, intense, passionnante. Je suis très heureux du niveau du championnat de France, Fleury Loiret, Nîmes, seront là, Issy Paris aussi avec le travail extraordinaire dans la continuité d’Arnaud Gandais. Nice va récolter les fruits du travail de Sébastien Gardillou, Toulon St-Cyr sera, je pense, l’équipe de cette 2è partie de saison. La fin de championnat s’annonce extraordinaire. Chaque année le titre a plus de valeurs, mais alors cette année si on parvient à le garder, il en aura encore plus.
Toulon St-Cyr, “l’équipe de cette 2è partie de saison“, selon le président messin.
Et la suite, comment la voyez-vous ?
Cette année, nous sommes dans une saison de transition : nous n’avons pas recruté, si ce n’est dans notre centre de formation, en donnant leur chance aux jeunes. L’an prochain, nous intégrerons 3 nouvelles joueuses du centre en équipe 1ère. C’est la politique du club dans les années à venir. Je veux saluer là le formidable travail de Yacine Messaoudi, qui fait venir à Metz les meilleures jeunes françaises (Glauser, Zaadi), les conduit à maturité, avant d’intégrer l’équipe pro.
J’aimerais aussi évoquer le cas des joueuses JIPES. Aujourd’hui cela représente un vrai défi pour l’ensemble des structures de formation françaises (fédération, pôles Espoirs et clubs) car, à mon sens, il n’y a pas encore assez, à tous les postes de jeu, de joueuses formées en France opérationnelles pour le très haut niveau.
Après presque 3 saisons d’application du dispositif, un premier bilan d’étape est prévu cette saison et nous devrons tous ensemble, Fédération et clubs, analyser objectivement la situation pour à la fois promouvoir la formation française, développer encore la compétitivité sportive des clubs et en même temps préserver nos économies dans un contexte toujours tendu où certaines joueuses ont des prétentions disproportionnées.
*Groupe 2. 1. Györ (8 pts), 2. Larvik (8 pts), 3. Metz (4 pts), 4. Viborg (3 pts), 5. Sävehof (1 pt), 6. Baia Mare (0 pt). Les 4 premiers de chaque groupe disputeront les 1/4 de finale. Metz se déplacera au Danemark, à Viborg, lors de la 1ère journée, le dernier week-end de janvier, et recevra Sävehof lors de la journée suivante. Plus d’infos sur la Coupe d’Europe sur le site de l’EHF.