La parole aux entraîneurs
Sandor Rac, Fred Bougeant, comment s’est passée la reprise du côté de Metz et Fleury Loiret ?
Sandor Rac. Tout se passe bien même si, avec le Mondial (9 internationales messines étaient en Serbie, ndlr), nous avons seulement repris le 2 janvier. Le 5, nous jouions déjà en Coupe de France à Mérignac (Mérignac 26-32 Metz). D’habitude à cette période, je préfère organiser un mini-stage, comme à Salzbourg, Vittel les saisons précédentes, pour bien se préparer physiquement. Là, ce n’était pas possible.
Fred Bougeant. Nous avons retrouvé les non-Mondialistes le 26 décembre, les Mondialistes (8 joueuses) le 28, et avec un jour de décalage notre internationale polonaise Karolina Siodmiak. Le 30, nous avons joué Le Havre en amical, puis le 6 janvier à Lyon en Coupe de France (Vaulx-en-Velin 25-33 Fleury Loiret). Nous avons pas mal travaillé par rapport à une période qui n’est jamais simple avec les fêtes. Je suis content, les filles ont été sérieuses.
L’après Mondial, est-ce une période particulière, difficile à gérer ?
S.R. Il faut forcément s’adapter, se remettre au travail. Nous étions contents de tous nous retrouver depuis le mois de novembre (J9, 20 novembre UMB-B 27-28 Metz, ndlr). J’ai senti une forte motivation. L’équipe nationale et le club, ce sont 2 choses différentes. Les joueuses savent faire la part des choses. Si certaines ont pu être déçues de leur Mondial, les vacances ont été une bonne coupure, pour digérer. Aujourd’hui, je sais qu’elles sont à fond avec Metz.
F.B. De toute façon pour nous, cela ne peut pas être pire que l’an passé (sourires). En 2013, nous avons eu un mois de janvier terrible. Je pense que c’était dû à l’année post-olympique, conjointement au lancement du projet de Fleury. Les filles ont déménagé, l’environnement, le contexte étaient nouveaux… Nous n’avons pas été épargnés par les blessures. L’entame de 2014 peut difficilement être pire qu’en 2013…
S.R. A Metz, nous avons des petits bobos d’après Mondial, Barbora Ranikova a mal à son genou, tout comme Yvette Broch, que j’espère récupérer pour la Coupe d’Europe. Svtelana Ognjenovic risque d’être absente plusieurs mois. Nous allons normalement faire signer Ana Gros qui s’entraîne avec nous depuis le début de la semaine (entretien réalisé jeudi 9 janvier, l’internationale slovène s’est depuis officiellement engagée avec Metz, ndlr).
Frédéric Bougeant a suivi, sur place, la prestation de ses 8 internationales en Serbie.
Vos 2 équipes avaient respectivement 8 (Fleury Loiret) et 9 joueuses (Metz) en Serbie, avec des fortunes diverses. Un contrecoup/relâchement psychologique est-il à craindre ?
F.B. Pour moi, psychologiquement, plus les joueuses vont loin, mieux c’est. Au niveau du vécu, de l’émulation, c’est très rentable pour le club. Karolina Siodmiak a atteint les ½ finales avec la Pologne, j’étais heureux pour elle. A Lisieux, la veille de notre match amical face au Havre, nous étions à l’hôtel et j’ai tenu à ce que l’on débriefe le Mondial, tous ensemble.
C’était la 1ère année que je le faisais comme ça. J’ai vu 32 matches, j’ai vu jouer toutes mes internationales, on a pu échanger. Certaines sont rentrées avec de la frustration, de la déception. L’idée était de pouvoir en parler tranquillement, qu’elles expriment leur ressenti personnel, handballistique. Et puis qu’elles acceptent le résultat, le digèrent, pour pouvoir basculer dans la suite de la saison en club.
S.R. Je n’ai pas senti de “mal-être“ particulier de la part de mes joueuses. Je les sens concernées et tournées vers les objectifs du club. Elles sont toujours très motivées, ce sont des joueuses professionnelles, elles veulent toujours gagner.
Metz a l’ambition d’être en haut, nous allons essayer de tout faire pour. Chaque année, on essaie d’être champions, mais c’est toujours un peu plus dur. L’an dernier, après le départ de plusieurs grandes joueuses (dont Amandine Leynaud, Allison Pineau, Claudine Mendy), on nous attendait peut-être moins. Cette saison, après notre doublé, tout le monde nous attend, on doit faire avec.
Vous étiez tous les 2 au Mondial, comment cela s’est-il passé ?
S.R. Je suis parti avec la DTN et plusieurs entraîneurs de LFH, c’était un beau Mondial. J’ai été sur plusieurs sites, j’ai vu une bonne trentaine de matches. La finale (Brésil-Serbie), qui s’est jouée devant plus de 20 000 personnes, c’était impressionnant. La ½ finale (Serbie-Danemark), aussi, nous étions plus de 15 000 en tribunes. 35 000 spectateurs en 2 rencontres pour le handball féminin, ça fait plaisir.
F.B. Je devais rester jusqu’aux 1/8è de finale et j’ai poussé un jour de plus pour voir la France en ¼. Je ne peux que remercier la DTN, le staff, Alain Portes pour leur gentillesse. Ils m’ont laissé voir des entraînements, venir les voir à l’hôtel, c’était super sympa. Avec Maakan (Tounkara), ma situation était un peu particulière mais tout s’est super bien passé. J’ai aussi pas mal bougé et j’ai vu un Mondial intéressant.
L’internationale serbe Kristina Liscevic attentive au discours de son entraîneur.
Sandor, qui supportiez-vous entre la France et la Serbie, qui est votre pays natal ?
Avec 9 joueuses au Mondial, j’avais plusieurs équipes à supporter (sourires). J’étais bien sûr pour la France, ensuite la Serbie est allée au bout, j’étais pour les Serbie aussi, avec en plus 2 joueuses de Metz. En finale, j’étais triste mais d’un côté content que la Serbie se soit hissée jusqu’ici. Si elles avaient rencontré la France en 1/2, peut-être que la qualification aurait été plus compliquée. Vice-champion du monde, c’est bien.
Selon vous, quelle est la meilleure joueuse du Mondial ?
S.R. L’Allemande Susann Müller. Elle joue à Leipzig, nous l’avons affronté en Ligue des Champions. C’est une arrière droite très complète. Elle peut évoluer à 3 postes (ailière, arrière, DC ).Elle est la meilleure joueuse de la compétition sans hésitation (meilleure buteuse du tournoi, 62 buts à 63% de réussite, ndlr).
F.B. Je dirais la Brésilienne Eduarda Amorim. Que ce soit avec Györ, champion d’Europe, ou avec le Brésil, champion du Monde, elle joue un rôle majeur dans le secteur défensif.
Aviez-vous également un œil avisé de recruteur ?
S.R. Oui c’est sûr. J’adorerais recruter Susann Müller à Metz mais les meilleures joueuses sont hors de prix maintenant pour nous. Les grosses écuries comme le Vardar, Krim Mercator, Podgorica… ont plus de moyens. Par contre, on peut dénicher de jeunes joueuses ou des internationales qui ont besoin de se relancer en club, après une blessure par exemple.
F.B. Moi aussi. Je venais en Serbie avec plusieurs objectifs : faire un état des lieux du contexte international, voir un maximum de matches, travailler pour l’avenir de Fleury. J’ai fait ce que j’avais à faire. Et suivre mes joueuses. Je suis allé sur les 3 sites, je n’ai pas uniquement suivi l’équipe de France.
Nina Kanto (Metz) et Koumba Cissé (Fleury Loiret), coéquipières en Bleues, adversaires mercredi soir.
Quel est le plus beau match auquel vous avez assisté ?
F.B. Les derniers matches du Brésil ne peuvent pas laisser indifférents. Espagne-Pologne (26-20) au tour principal, et sur le plan affectif, France-Pologne (21-22). D’un côté, la déception pour la France et de l’autre voir Karolina (Siodmiak), avec qui je travaille depuis 10 ans, mener son équipe comme elle l’a fait, l’emporter, et ensuite venir nous embrasser en tribunes. On a les larmes aux yeux avec toutes ces émotions.
S.R. Pour moi, le match le plus relevé, ça a été Danemark-Allemagne (31-28) en 1/4 de finale. L’équipe d’Allemagne m’a très agréablement surpris. Si l’Allemagne avait gagné ce 1/4, très serré, je pense qu’elles auraient pu aller au bout.
Votre regard sur l’équipe de France ?
S.R. Il y a eu des choses intéressantes, comme la victoire face au Monténégro. Battre les championnes d’Europe, vice-championnes olympiques, ce n’est pas donné à tout le monde. Perdre face à la Pologne, c’est dommage mais c’est le sport avec sa part de surprises. J’ai trouvé que Nina (Kanto) a fait un Mondial vraiment correct, Grâce (Zaadi), c’était son 1er championnat, elle a fait de belles choses, mais je sais qu’elle peut encore être mieux. Paule Baudouin a fait du bon boulot, dans un poste qui est bien pourvu en équipe de France.
F.B. Après avoir battu le Montenegro, la Corée du Sud, on a peut être cru que la médaille était assurée, que le tableau s’ouvrait. En 1/4, il y a eu de défaillances techniques pour espérer se qualifier. La technique avec la balle, c’est un axe de travail en sélection mais aussi en clubs. Sinon, le climat qui règne dans l’équipe est hyper positif, c’est bien pour la suite. D’ailleurs, je pense que les joueuses ont déjà hâte d’être au prochain rassemblement.
Demain sur le site de la LFH, retrouvez la 2è partie de l’interview consacrée à l’affiche entre Fleury Loiret et Metz.