Dans la famille Chiffoleau… avec Max et Jules !
À bientôt 27 ans, Max et Jules Chiffoleau ont pris une place bien à eux dans le paysage de l’arbitrage français. Arpentant les 40 x 20 de la France entière, ils s’entendent comme chien et chat dans la vie de tous les jours, mais ne forment qu’un sur le parquet. Un duo caustique à ne pas manquer et qui sied parfaitement à notre rubrique « Dans la famille ».
Jules, Max, qui êtes-vous ?
Jules : Je m’appelle Jules, j’ai 26 ans, bientôt 27. Je suis né à Nantes. Dans la vie je suis enseignant d’EPS en Seine-Saint-Denis. J’ai commencé le hand à l’âge de 6 ans et l’arbitrage vers 12/13 ans. Et c’est déjà pas mal…
Max : Moi je suis donc Max, j’ai 26 ans également, pas de surprise là-dessus. Dans la vie, je suis ingénieur d’affaires pour une société de conseils qui s’appelle Leyton. Pour le hand, ça fait 20 ans que l’on a une licence : la première que l’on a prise était à La Chabossière, à côté de chez nos parents, et aujourd’hui on est à l’Atlantique Rezé Handball. Où l’on joue encore.
Vous continuez de jouer avec Rezé ?
Max : Oui, exactement.
Jules : Moi, un peu moins, comme je travaille en Île-de-France. J’ai dû faire 3 entraînements et 3 matchs cette saison (rires)… Mais je n’ai pas pris de licence ailleurs, je n’ai qu’un seul club ! Moi j’ai commencé ailier gauche et maintenant je suis plus sur la base arrière et Max est plus sur le poste de demi-centre.
Complémentaires donc…
Jules : Les coachs se sont toujours débrouillés pour que l’on joue ensemble !
Comment est née la passion pour le handball chez vous ?
Max : Notre père a fait du handball pendant très longtemps. Il coachait à la Chabossière, là où on a commencé. Depuis petits, on est dans les salles et on a fait toutes nos premières années là-bas. On passait tous nos samedis et nos dimanches au handball. Et puis la passion de l’arbitrage est venue ensuite. Au début, c’est comme souvent, il y avait besoin d’arbitres, donc on a dépanné. On l’a fait ensemble car ça arrangeait nos parents pour nous emmener. C’était d’abord pour donner un coup de main plus que par passion. Et puis ensuite, dans le parcours handball, on a intégré la section sportive de la Colinière, à Nantes, en sport études en tant que joueurs. Là-bas, c’était Coralie Cochard qui était une des responsables de la section et qui nous entraînait. Elle était arbitre sur de la N1 garçons et de la D2 féminines si je me souviens bien. Elle nous a proposé de venir participer aux stages d’arbitrage départementaux, une journée pendant les vacances scolaires. Elle nous avait vendu cela comme une journée où on passe notre temps à jouer et où on arbitre une fois 10′ le matin et une fois 10′ l’après-midi. Et là, on se retrouve 12 ans après à arbitrer des matchs en D1 féminine et D2 masculine.
Lequel a été le plus vite piqué d’arbitrage ?
Jules : Franchement, c’était pareil. On ne s’est pas posé la question de savoir si on aimait ça. On est arrivé, on a commencé. Sur les premiers niveaux départementaux, comme on était déjà en section sportive, on avait déjà 4 à 5 entraînements par semaine, le handball on connaissait, on en voyait beaucoup car on était toujours dans les salles. On connaissait bien les bases. Et quand on te dit que tu es compétent sur ces niveaux, ça ne te donne pas envie d’arrêter. Tu y vas et tu prends plaisir à le faire car il n’y a pas de grandes difficultés. Cela a été comme ça jusqu’au niveau régional. On a toujours suivi le niveau auquel on jouait.
Max : On aimait ça, on rencontrait les mêmes joueurs quand on jouait ou quand on arbitrait. Ça se passait bien.
Comment s’est faite la transition entre jeu et arbitrage vers le haut niveau ?
Jules : Cela s’est fait simplement quand on est passé en prénational. La Ligue des Pays de la Loire nous avait demandé de faire un choix et de prioriser l’un ou l’autre. Pour nous, ça n’était même pas une discussion. Sur notre dernière année de section sportive, on nous avait dit que le maximum que l’on pourrait atteindre en terme de niveau comme joueurs, ça serait prénational. On était néanmoins compétiteurs et on s’est dit qu’avec l’arbitrage on pourrait aller plus haut et c’est ce que l’on a fait. Ce qui était top, c’est que notre club faisait le maximum pour mettre nos matchs seniors le dimanche afin que l’on puisse jouer avec eux tandis que l’on arbitrait le samedi.
Max : Aujourd’hui, la particularité est que l’on reste des arbitres de haut niveau de la Fédération Française de Handball donc la priorité va à l’arbitrage. Ce qui implique des choix. Rezé a une équipe en N3 et une en honneur régional. Du coup, je joue depuis septembre avec l’équipe de N3, je m’entraîne encore 3 fois par semaine mais quelques pépins physiques m’ont écarté des terrains depuis décembre. Rien de méchant mais tout cumulé, à un moment, il faut faire des choix. Et être principalement sur l’arbitrage. On fait attention à soi !
Quelle est la principale qualité de l’autre dans l’arbitrage ? Et son défaut ?
Max : Jules, c’est quelqu’un de très impulsif par moments qui ne réfléchit pas toujours quand il parle. En revanche, c’est quelqu’un de très perfectionniste dans ce qu’il fait !
Jules : Max, c’est quelqu’un qui parle beaucoup, beaucoup, beaucoup… (sourire). Des fois, c’est dur de l’avoir dans l’oreillette !
Max : C’est quoi mon défaut du coup ?
Jules : Et sa QUALITÉ donc… Tu as des qualités ?
Max : Je suis plus calme on dira.
Jules : Ça fait donc deux défauts (rires).
Cela n’empêche pas votre duo de plutôt bien fonctionner…
Max : On est obligé de bien s’entendre et de faire que cela fonctionne. Plus jeunes, c’était compliqué, on ne va pas se mentir. On s’engueulait carrément. Ça m’est arrivé de débrancher l’oreillette parce que j’en avais ras-le-bol. Il y a plus de 5 ans quand même. On est taquins, on n’a pas la même façon d’appréhender les choses. Des fois, il y a des étincelles entre nous, mais sur un terrain de hand, aujourd’hui, il n’y a plus aucune frictions comme il y aurait pu en avoir par le passé. On s’entend bien, on va dans le bon sens. Et on connait les limites de tolérance de l’autre. On sait quand on va trop loin. On s’arrête et on discute après match.
Jules : C’est ce que j’allais dire !
Max : Tu vois, je parle longtemps mais je suis précis (sourires).
Quelle place tient votre gémellité dans votre activité ?
Jules : À la fin du CP, on a été scolarisés dans une classe différente, sauf que quand on est rentré en section sportive au collège, on s’est retrouvé dans la même classe. On a donc eu une grosse période où on était toujours associés. On était toujours Jules et Max.
Max : On était quasi une seule et même personne. On a pris chacun un parcours différent après le lycée. En STAPS, je suis parti sur le management du sport et Jules est parti sur l’enseignement. Et là, on a évolué chacun de notre côté. Si on se regarde aujourd’hui par rapport à la fin du lycée, on est complètement différents, alors qu’au lycée on se ressemblait beaucoup tant physiquement que dans le comportement. Néanmoins, aujourd’hui, il n’y a pas un jour où on n’échange pas par messages.
Pour autant le sujet pour moi n’est pas tant la gémellité que le fait qu’on ait toujours tout fait ensemble. C’est globalement comme si c’était mon meilleur pote plus que mon frère comme je pourrais avoir avec quelqu’un qui aurait un ou deux ans de plus que nous. On n’en a pas parlé mais on a aussi une petite sœur avec qui on s’entend très bien.
Jules : Je ne suis pas sûr que quand on était plus jeune, le fait d’être jumeaux, sauf pour des questions d’intendance type nous emmener ensemble à un endroit, c’était plus facile. Car dès qu’il y avait un truc, c’était frictions/frictions. Quand on s’entraînait en section sportive, le nombre de fois où on se prenait la tête pour des choses futiles, c’était impressionnant. Même chose sur le terrain. Peut-être que l’on serait arrivé au niveau national si on était séparé.
Après avoir grandi et mûri, le fait de se connaître par cœur est une force. On a une vie séparée mais quand on se retrouve pour arbitrer, on arrive dans les gymnases on essaye d’être habillés de la même manière, on essaye d’avoir la même technique, d’avoir les mêmes décisions.
Vous avez pensé arbitré l’un sans l’autre ?
Max : On l’a déjà fait. Quand Jules s’est blessé, je l’ai fait aussi. Mais c’est moins fun. Si on le fait, à première vue, c’est que l’on cherche moins la performance. Quand on est tous les deux, on cherche la perfection. On va à un niveau de détails ultra-poussé. Si demain on arbitre avec quelqu’un d’autre, la qualité sera impactée. Si l’un décide d’arrêter l’autre le fera aussi je pense.
Jules : Quand on a arbitré séparément, c’était sur des matchs amicaux. Mais pas dans l’objectif de le faire 25 à 30 fois par an. Si Max me dit qu’il ne veut plus passer ces week-ends à ça, ça imputera aussi ma carrière, forcément.
Sur le terrain, jouez-vous de cet atout particulier ?
Max : Quand les joueurs ou joueuses ne nous connaissent pas, ils ne se rendent parfois compte du truc parfois qu’une fois que le match est terminé. On revient donc sur le fait que l’on est qu’une seule et même personne sur le terrain. On a fait des tournois avec les équipes de France jeunes où certains ne s’en rendaient compte qu’au bout de deux jours. Ça montre que ça n’est pas leur priorité… Ils veulent simplement jouer et nous on doit les aider à ça. Parfois ça nous met juste en porte-à-faux car si l’un passe une communication à un joueur ou une joueuse et qu’ils viennent voir l’autre membre du binôme et posant une question sur le point précis, ça peut troubler un peu. Heureusement on a les oreillettes !
Quelle place ont vos métiers dans votre vie ?
Jules : Après le bac, je suis rentré en STAPS car je savais que je voulais être dans le sport mais exactement comment. Et au fil de mes études, je suis entré dans le filière motricité éducation. J’ai aimé ça et cela s’est fait dans la continuité. J’ai la chance d’être enseignant avec des collègues arrangeants donc je cale mes heures face aux élèves en début de semaine afin d’avoir jeudi et vendredi pour partir sur les rencontres. Et si je ne peux pas assurer mes cours et l’arbitrage, cela reste l’arbitrage qui prime via la Fédération. On est sur la liste adéquate.
Max : J’ai fait une licence management du sport et j’ai voulu quitter ce monde sportif parce que j’avais envie de voir autre chose. J’ai fait une alternance en école de commerce. Et je suis depuis 3 ans dans la même société. Elle est plutôt conciliante avec ma double activité. J’ai un statut cadre donc quand le travail est fait, je ne suis pas embêté et ils sont au courant de mes déplacements. Certains de mes collègues regardent mes matchs. C’est une chance d’être dans cette société! Quand on a des déplacements dans le train, je fais mon administratif par exemple. Le plus embêtant, c’est quand on doit se déplacer en voiture finalement car je ne peux pas faire deux choses en même temps.
Crédits : DR et Paul Parmentier