Dans la famille Depuiset avec Camille et Romane

Après notre premier épisode « Dans la famille de… » consacré à Mathilde et Pauline Plotton, nous partons à la rencontre d’un autre duo de sœurs… Elles auraient même pu constituer un trio avec leur jeune frère, Maxence, qui grandit sereinement du côté d’Aix-en-Provence, ce sont évidemment les sœurs Depuiset. Camille et Romane sont des figures incontournables de la LFH. La première, internationale, est la portière de Metz en Ligue Butagaz Energie tandis que la seconde est pivot et capitaine de Vaulx-en-Velin en D2F. 

L’INTERVIEW CROISÉE AVEC LES SOEURS depuiset

Camille, Romane, pouvez-vous vous présenter ?

Camille : Je suis donc Camille Depuiset, j’ai 25 ans et je suis gardienne de but à Metz Handball depuis 2 saisons. Cela fait 6 saisons que j’évolue en LBE en tant que pro et 8 si on compte les années en centre de formation. Je suis par ailleurs à mon compte en tant que distributrice d’une gamme de cosmétiques, de produits de soin et de compléments alimentaires.

Romane : Moi je m’appelle Romane, j’ai 22 ans et je suis pivot à l’ASUL Vaulx-en-Velin. C’est ma 5e saison au club. Et à côté du handball, je suis aussi étudiante en école d’ingénieur à l’INSA de Lyon, cursus génie civil et urbanisme.

Vous devez, chacune, avoir des journées bien remplies…

Romane : J’ai toujours été bonne à l’école et je n’avais pas envie de lâcher ce côté-là. En sortie de lycée, je ne savais pas forcément ce que je voulais faire, dans quoi me lancer, et je ne voulais pas arrêter non plus le hand, car je savais que je pouvais jouer à un niveau qui serait encore du haut niveau. Et comme j’ai toujours été intéressée par les sciences, je suis partie là-dedans. J’ai un parcours aménagé car c’est une école qui se fait en 5 ans normalement, mais que je vais faire en 7. Ce qui est vraiment bien à l’INSA, c’est qu’ils proposent de vrais aménagements. On a une classe de sportifs issus de disciplines très différentes et on a notamment le lundi matin et le vendredi après-midi qui sont banalisés si on a besoin de week-ends prolongés. On a accès à une salle de musculation, des ostéopathes, de la préparation mentale. Ce qui est positif, c’est que c’est une école renommée et que cela permet de concilier le sport et les études à la hauteur de ce dont je me sentais capable. Car les cursus sont quand même assez rares si tu veux tout mener de front. 

Camille : Pour moi, cette double activité a été dictée par le fait que je n’aime pas m’ennuyer et ne faire que du handball. Avant d’avoir le rythme de Metz, j’ai vu que la routine entraînement/repos/match n’était vraiment pas pour moi. J’avais besoin de faire autre chose. Le confinement a d’ailleurs été un déclic pour ça. Et je sens que je suis plus épanouie et plus performante quand je ne suis pas centrée que sur le handball. Niveau études, en parallèle de mon passage en centre de formation, j’avais réussi à obtenir un bac +3 en langues étrangères appliquées anglais/allemand au prix d’un sacré casse-tête entre entraînements et matchs. Et puis cette opportunité m’est tombée dessus par la suite. Ça a matché et je me suis lancée car ça fonctionnait bien avec mes contraintes d’emploi du temps. C’est comme je veux et avec qui je veux. Je passe de l’un à l’autre et je ne me mets aucune pression. Ça me permet d’avoir une autre activité, de rencontrer d’autres gens et d’aider chacun à se développer. 

Comment s’est passée votre première rencontre avec le handball ?

Camille : Notre père, Jérôme, a été handballeur jusqu’au niveau D2, à Dijon. Mais il ne nous a pas mis d’office sur un terrain de hand. Pour moi, ça a été via un forum des sports où on s’était rendu : j’ai voulu tester le hand et j’y suis restée. Je n’ai jamais pratiqué un autre sport depuis mes 5/6 ans. Ça a ruisselé ensuite vers ma sœur et mon frère. C’est désormais une passion commune chez nous.

Romane : De mon côté, je me souviens quand même d’avoir pas mal traîné dans les salles de hand (rires). Je me souviens surtout qu’une année, j’ai dit : « je veux passer sur le grand terrain sinon j’arrête et je fais autre chose. » Il s’avère que c’était l’année où on allait effectivement jouer sur grand terrain, donc tout a parfaitement été. Mais si j’avais voulu faire autre chose, ça n’aurait pas été un problème. Il n’y a jamais eu de pression de la part de nos parents et on a toujours été très soutenus. Ma sœur a été là pour nous ouvrir la voie. Très tôt, elle a été performante en intégrant les collectifs équipe de France. Et puis pour une petite fille, le premier modèle, c’est quand même souvent la grande sœur quand il y en a une. J’ai toujours été très admirative et fière de ce qu’elle faisait et de ce qu’elle fait toujours. C’est très beau de la voir réussir et de la soutenir ; et à l’inverse d’avoir son soutien dans mes projets qui sont différents mais qui se rejoignent dans beaucoup d’aspects. 

Vous vivez le handball pro dans deux clubs très différents. Vous, Camille, vous vous épanouissez comme internationale et visez le titre de LBE ainsi que la Ligue des Champions, tandis que vous, Romane, êtes partie dans une lutte pour le maintien en D2F. Au-delà de vos âges, qu’est ce qui vous différencie ?

Camille : Je n’ai pas envie de nous comparer dans nos parcours pro car on n’a justement pas le même âge et on a des objectifs très différents dans nos vies actuelles. Romane joue en D2 et elle est en parallèle en école d’ingénieur. Elle a un rythme d’entraînement de D1 dans sa pratique et en parallèle, elle se fait des maths toute la journée. C’est fou. Tenir les deux bouts, c’est vraiment admirable. En plus, elle est capitaine, elle a des responsabilités dans une équipe jeune, le tout dans un club qui continue de se structurer. Elle mène beaucoup de choses de front et j’en suis vraiment admirative.

Romane : Pour le moment, on n’est pas dans la même cour. Mais il y a un énorme investissement d’autant que j’ai changé de poste, au pôle, pour devenir pivot, car on m’a dit que si je voulais évoluer à plus haut niveau, cela passerait par là. À Vaulx-en-Velin, je suis dans un petit club de D2, qui se débrouille avec les moyens qu’il a, mais je suis fière de mon parcours. J’ai toujours voulu faire le mieux possible avec ce double projet. Et, même si j’ai eu des propositions, quand tu trouves un équilibre, c’est aussi une performance de réussir à le garder. La fidélité est aussi une valeur importante. L’objectif, pour moi, c’est de continuer d’évoluer dans la division en me fixant des objectifs personnels, comme de progresser à mon poste, gagner du temps de jeu, affirmer ma place dans le groupe. Avant de penser à changer d’endroit, il faut déjà avancer dans son propre club.

Camille : Et quand tu changes, tu dois savoir t’adapter ! C’était important pour moi, la saison dernière, d’arriver à Metz et vite prendre mes marques parce que tu n’as pas le temps de cogiter dans un club comme celui-là. Tu dois vite te mettre dans le bain et prendre le train parce que sinon ça peut être très compliqué. Et comme je ne suis pas quelqu’un qui subit les choses, je voulais saisir tout ce qui était possible. Ma première saison a été plutôt positive sur beaucoup de plans même s’il y a eu des moments moins bien. J’espère que ça va être encore mieux cette saison car il y a de belles choses en perspective.

Vous avez 3 ans d’écart et êtes encore jeunes, pourtant malgré le jeu des catégories d’âge et des changements de clubs, vous avez quand même échangé quelques ballons ensemble…

Romane : C’est quelque chose de précieux, oui. Il y a eu très peu de temps ensemble car j’ai intégré la N1 de Toulon quand j’avais 14 ou 15 ans tandis qu’elle était en fin de centre. Il y a eu donc quelques moments, quand elle redescendait, où on s’est retrouvé. C’était très fort, très important comme émotions. C’était un rêve, petite de partager le terrain avec elle.

Camille : J’ai adoré ça aussi. Mais c’était vraiment bizarre car je me souviens avoir appréhendé le fait de devoir lui dire de corriger quelque chose sur le terrain, et ce parce que c’est ma coéquipière et pas parce que c’est ma petite sœur. Je n’avais pas envie que l’on rentre en se faisant la gueule à la maison ! En vrai, on ne s’est jamais fâché à cause du hand car on est très liés. 

Romane : Le plus marrant, ça a été de jouer l’une contre l’autre finalement, sur un match amical entre Bourg-de-Péage et Vaulx-en-Velin. T’arrives devant la cage et tu dois tirer, mais tu as presque plus envie de rigoler en fait car tu sais que tu la connais mais qu’elle te connaît aussi.

Mais alors est-ce que Romane avait beaucoup marqué ?

Camille : Elle avait provoqué pas mal de penalties !

Romane : Et peut-être inscrit deux buts… (rires)

On vous sent très complices…

Camille : Ma sœur et mon frère, c’est ma vie ! Si je devais arrêter ma carrière pour leur donner un bras ou une jambe, je le ferais. J’ai envie que l’on réussisse tous dans ce qui nous épanouit. Je suis la première à être triste si l’un de nous perd et la première à être heureuse quand l’un de nous gagne.

Romane : C’est vrai que l’on est très proches et qu’il n’y a quasi pas de conflits chez nous. Quand on arrive à se retrouver, ce qui est rare, c’est toujours très beau. On rit beaucoup, on chante des chansons. 

Ah oui ?! Quel type de chansons ?

Romane : On a une comédie musicale que l’on regardait beaucoup quand on était petits et qui revient à chaque réunion de famille : Cléopâtre, la dernière reine d’Egypte. À chaque fois que l’on est tous ensemble, on peut être presque sûrs que papa va mettre la chanson sur l’enceinte et que tout le monde va se regarder, rigoler et se mettre à chanter.

Vous qui connaissez bien l’autre, quelle est sa principale qualité ?

Romane : Camille, c’est une battante, elle travaille beaucoup et puis elle a aussi un côté très sensible. On se rejoint beaucoup sur ces points, mais on l’exprime différemment. On ressent beaucoup son énergie volcanique tandis que je serais plus force tranquille. On a en commun ces valeurs du travail, de l’empathie. 

Camille : Ce que j’aime chez elle, c’est sa légèreté dans certaines situations. Parfois, elle est dans son monde et elle laisse couler les trucs. Je trouve ça bien de ne pas tout prendre à cœur d’autant qu’on vit, de fait, en communauté avec des gens qui ont différents caractères, différentes façons de voir le monde. C’est difficile parfois de rester placide quand il y a autant d’intimité. Et puis surtout, quand ça ne va pas, je sais que j’ai juste à l’appeler et qu’elle va me faire rire.