ITW – A. Lacrabère : « On parle de nous quand on a des résultats, et après on passe aux oubliettes… »
(photo : Bertrand Delhomme)
Une carrière XXL, un palmarès incroyable et un caractère affirmé, Alexandra Lacrabère fait incontestablement partie du cercle fermé des joueuses qui ont marqué, et qui marquent encore dans son cas, le handball féminin français. A 32 ans, la Paloise est une joueuse accomplie, qui contribue désormais à la réussite du Fleury Loiret Handball et au rayonnement de la Ligue Butagaz Energie. A l’occasion de l’opération « Sport Féminin Toujours » qui se déroule ce weekend, nous avons abordé le sujet de la médiatisation du sport féminin avec l’internationale française, qui nous a répondu avec son franc parlé habituel, sans langue de bois.
« Nous sommes égales aux gars, et je pense même que nous avons plus de mérite dans certains contextes. » Pour Alexandra Lacrabère, il est difficile d’accepter les inégalités qui existent aujourd’hui entre la médiatisation des pratiques sportives féminines et celles masculines. De l’incompréhension, c’est le sentiment ressenti par la multiple médaillée internationale, lorsqu’elle a appris la difficulté rencontrée en début de saison pour trouver un diffuseur au championnat de France. « Il y a eu une avancée, et puis un gros pas en arrière. On parle de nous quand nous avons des résultats, et puis un mois après on passe aux oubliettes. J’avais publié un message sur les réseaux sociaux : on nous demande de gagner, nous sommes championnes d’Europe et nous avons été championnes du monde, et derrière nous pouvons voir que l’intégralité du championnat masculin va être diffusé, et plus rien pour la Ligue Butagaz Energie. Il y a eu une vraie incompréhension.« . De l’incompréhension à l’espoir, avec l’arrivée de Sport en France en tant que diffuseur officiel pour la saison 2019-2020, ainsi que des playoffs codiffusés sur la chaine l’Equipe « Je remercie encore Sport en France et la chaîne L’Equipe de nous retransmettre cette saison sur des chaînes accessibles à tous. C‘est une réelle avancée et c’est positif.« .
Dans un contexte où la médiatisation du sport féminin est un sujet central pour les pouvoirs publics, celle qui a débuté sa carrière professionnelle en 2006 au CA Bègles acquiesce lorsqu’on lui parle d’évolution positive pour la visibilité du sport féminin, mais elle reste cependant mesurée. « On peut dire que le handball féminin est plus médiatisé qu’avant, mais ce n’est pas à la hauteur. Nous avons des résultats, que ce soit les clubs en Ligue des Champions avec Metz et Brest, ou l’équipe de France sur le plan international. Je parle du handball, mais c’est le même problème pour les autres sports comme le rugby par exemple…« . Pour Alexandra Lacrabère, ce manque d’exposition a des répercussions sur le développement des clubs, « Ce manque de médiatisation entraîne des difficultés pour les clubs à trouver des sponsors, et c’est une vraie problématique. » Dans un environnement où les femmes doivent faire face à de nombreuses barrières pour vivre de leur passion, ce manque de reconnaissance de la part des diffuseurs est difficile à encaisser pour la joueuse de Fleury… « Beaucoup de joueuses doivent assumer des doubles projets, les rémunérations ne sont pas les mêmes, il y a aussi la question de la maternité. Ce n’est pas évident pour une joueuse professionnelle d’avoir une vie de famille, de revenir après une grossesse… Les garçons n’ont pas à gérer ces problématiques, souvent leur femme les suivent dans leur carrière, alors que l’inverse est rarement vrai« , avant de conclure « Je pense vraiment que le public veut nous voir jouer, le spectacle que nous proposons est intéressant, voire plus que celui des hommes qui est un handball de plus en plus individualiste« , le message est passé !