Dans la famille Modenel… avec Sébastien et Lucie !

Respectivement coach de l’ASUL Vaulx-en-Velin et demi-centre du Chambray Touraine Handball, Sébastien et Lucie Modenel forment un duo familial original au plus haut-niveau, puisque père et fille. Et ce alors qu’il y a quelques mois, on aurait même pu parler de trio car l’aînée de la fratrie, Valentine, évoluait aussi du côté de Clermont. Mais pour l’heure, ce sont bien les deux premiers qui se plient à notre interview pour cette rubrique « dans la famille » où personne n’est oublié, pas même la mère, Cathy.

Sébastien, Lucie, qui êtes-vous ?

Sébastien : Je suis Sébastien Modenel, j’ai 46 ans et je suis actuellement le coach de l’ASUL Vaulx-en-Velin, en D2F. Comme beaucoup de jeunes, j’ai commencé le handball vers 8 ou 9 ans. C’était au club de Murat, dans le Cantal. J’y ai évolué sur toutes mes années championnat de France avant de partir à Chambéry afin d’effectuer une année en centre de formation et un peu de D1, à l’époque. Après j’ai du arrêter pour des soucis physiques. Donc je suis revenu dans le Cantal puis à Montélimar pour évoluer en N1 et D2, tout en continuant, dès mon plus jeune âge, à encadrer et arbitrer. Et depuis, je ne me suis jamais arrêté jusqu’à devenir entraîneur pro.

Lucie : Et moi je suis Lucie Modenel, j’ai 22 ans, j’ai commencé le handball au club de Saint-Flour. Ensuite je suis partie à Clermont-Ferrand une année avant d’aller au centre de formation de Bourg-de-Péage et ensuite je suis devenue joueuse au Chambray Touraine Handball depuis deux saisons.

Le handball est donc une vraie affaire de famille chez vous…

Sébastien : Oui vraiment. J’ai rencontré ma femme, Cathy, sur les terrains. Elle évoluait en N1B à l’époque. Et puis, nous avons eu deux filles qui ont fait pas mal d’activités, mais qui étaient tout de même tous les week-ends sur le bord des terrains avec nous. Elles ont donc mordu au hand. On s’est pourtant attaché à ce qu’elles testent plusieurs sports, plusieurs activités, avant de choisir mais bon elles ont décidé de faire une carrière dans le handball.

Valentine a eu l’opportunité d’aller jusqu’à la D2F avec Clermont, mais deux blessures consécutives aux croisés ont un peu stoppé son évolution, pour le moment. Lucie, elle, est en Ligue Butagaz Energie, à Chambray, elle construit son parcours, petit à petit.

Lucie : J’ai quasiment appris à marcher dans les gymnases puisque j’allais voir soit mon papa soit ma maman jouer. Ma sœur a commencé l’activité et naturellement j’ai eu envie de faire comme elle. Elle m’a toujours guidée. Au début, c’était juste une passion qui me prenait toute mon énergie, mais j’avais toujours envie de m’entraîner, d’en faire trois fois plus que les autres. Et après je me suis dit que je voulais vraiment en faire mon métier. Et voilà !

Pour autant, chez les Modenel, on ne met tous ses œufs dans le même panier. Sébastien, vous avez un parcours assez atypique tandis que vous, Lucie, et votre soeur n’avaient pas que le hand en tête. C’est vrai ?

Lucie : Même si je suis à fond dans ma pratique, c’était important pour moi d’avoir un métier à côté. Mes parents m’ont inculqué cette notion de travail et de rigueur. Une blessure peut arriver n’importe quand. J’ai donc fait un BPJEPS musculation et haltérophilie pour potentiellement être préparateur physique dans l’avenir.

Sébastien : C’est vrai qu’aujourd’hui je suis dans un métier passion. Mais avant cela, j’ai préféré changer de direction pendant quelques années en faisant un choix plus familial. J’ai arrêté le sport pro et j’ai monté mon entreprise dans le bâtiment, pendant 16 ans, tout en restant tout de même dans l’encadrement. Et ce avec l’idée en tête de revenir dans le hand pro quand mes filles seraient assez grandes pour être autonomes. J’ai eu l’opportunité de revenir et j’ai franchi le cap. Entraîneur pro est un métier particulier, à risques, mais je ne le vois pas comme ça car je n’ai pas fait ça toute ma vie et que, quoi qu’il arrive, avec mon bagage, je peux avoir d’autres opportunités qui peuvent s’ouvrir dans d’autres branches. Du coup, je sais que je peux me remettre en question constamment, tenter de faire le mieux possible pour mon équipe. Si ça se passe bien, c’est bien. Sinon il faut être capable de passer à autre chose.

Quel regard portez-vous sur votre parcours jusque-là et notamment cette saison ?

Sébastien : La D2F devient de plus en plus compliquée. Et nous sommes un club en reconstruction. Il y a donc beaucoup de travail à faire. Je savais que l’on allait galérer jusqu’à Noël car on a effectué un recrutement essentiellement en N1, et que N1 et D2, ce sont deux mondes différents. Il fallait donc faire progresser les joueuses, les faire travailler. Mais aujourd’hui, on y est, on avance. Malgré tout, on a un petit effectif donc la moindre blessure peut devenir problématique. À cela, il faut ajouter que la moyenne d’âge de mon collectif doit être d’environ 21 ans. Il y a du potentiel, mais on a besoin de stabilité pour progresser encore. On est, dans tous les cas, dans la bataille pour le maintien.

Lucie : Pour le moment, je peux être fière de pas mal de choses. En clubs, j’ai déjà pu prendre pas mal d’expérience puisque j’ai joué dès mes 17/18 ans en LBE. Je suis assez polyvalente et j’ai pu progresser sur beaucoup de choses. J’ai aussi effectué des stages avec les équipes de France jeunes en ayant été capitaine. Mais j’ai la volonté de ne pas m’arrêter là, de faire toujours mieux et je travaille pour. On verra dans les prochaines années où cela me mènera. Je rêve évidemment d’être en équipe de France un jour, je veux tout faire pour y parvenir. Mais cela passe par de bons résultats en club. Cette saison, j’ai découvert la Coupe d’Europe, ça a été un peu compliqué pour nous car, sur les débuts, on avait des cadres absentes, mais on s’en est pas mal sorti. On espère passer certains stades la saison prochaine.

Et quel regard vous portez sur l’autre ?

Lucie : Le parcours de mon père peut étonner, mais moi ça ne me choque pas. Je connais mon père et je savais que, depuis toujours, il avait mis cela de côté et qu’il y reviendrait. C’est plus qu’une passion pour lui. Il nous a transmis cela, cette volonté de travailler, s’adapter, se donner à fond. Il a ce jeu qui est d’explorer de nouveaux horizons dans le même sport. Il n’a jamais arrêté le handball. La vie n’est pas linéaire. Et lui aime profondément travailler. On a l’impression qu’il est toujours en surcharge, mais ça n’est pas le cas, il adore juste faire des trucs (sourires). Il est touche-à-tout. Et c’est grâce à lui et à ma mère qu’avec ma sœur on va au bout de nos projets. Lui et elle sont très inspirants pour nous !

Sébastien : Je suis très fier des parcours de mes deux filles, de leurs engagements, de leur combativité en général. Les blessures peuvent jouer un rôle énorme, tout comme les choix, les opportunités et c’est pour ça que deux filles élevées de la même manière, qui viennent du même endroit, ont des parcours différents. L’objectif est qu’elles réalisent simplement leurs rêves. On fait tout pour ça, comme beaucoup de parents. Lucie progresse en LBE tandis que Valentine est désormais en N1 avec de belles études et un métier qui lui plait.

Sébastien, vous avez coaché vos filles, jeunes à Saint-Flour, puis à Clermont-Ferrand en N1, est-ce difficile d’être à la fois père et entraîneur ?

Sébastien : On est peut-être plus exigeant avec ses enfants. Et c’est quelque chose de toujours compliqué, plutôt plus pour elles, avec le regard des autres, que pour nous finalement. Pour moi, cela n’a jamais été un problème. Ce sont des joueuses comme les autres, que l’on doit faire évoluer en fonction de leurs objectifs. À la maison, on parlait peu de handball, contrairement à d’autres. Le jeu, c’était sur le terrain comme tout le monde et chez nous, tout le reste.

Vous êtes d’accord Lucie ?

Lucie : On a eu nos deux parents comme entraîneurs, avec ma mère plus quand on était petites. Ils nous ont inculqué les valeurs de dépassement nécessaires pour parvenir au plus haut niveau. C’est un apport précieux. Mais c’était parfois difficile car ils étaient justement très exigeants avec nous. Mais à la maison, on faisait aussi la part des choses. La difficulté était, pour chacun, d’être à la bonne distance. Ce qui n’est pas forcément facile quand on est ado. Après au fil du temps, c’est devenu forcément différent. Je prends les conseils avec plus de plaisir maintenant (sourires). Et on échange beaucoup sur les joueuses avec mon père aussi. Après quand tu es plus jeune, il y a la notion de vouloir rendre fier aussi. Des fois je me disais que je n’étais pas assez bonne. Tu veux prouver, même si je sais désormais que déjà, il était fier et que c’est moi qui me mettais une pression supplémentaire.

Est-ce que l’on peut imaginer vous revoir sous le même maillot ?

Sébastien : Mon objectif personnel est d’évoluer le plus haut possible comme coach, chez les filles comme chez les garçons, donc j’espère pouvoir recroiser Lucie un jour en première division par exemple.

Lucie : J’espère l’affronter en match officiel surtout. Rejouer pour lui, ça serait possible car c’est un coach qui m’a fait progresser, forcément. Mais il faudrait que les choses soient bien posées, notamment vis-à-vis des dirigeants et des partenaires pour ne pas qu’il puisse y avoir des soucis de statut au regard de notre lien familial.

Mais vous avez déjà joué face à face ?

Sébastien : Avec l’ASUL, j’ai affronté Valentine quand elle était encore à Clermont. C’était forcément particulier mais surtout l’occasion de se retrouver en famille. Je n’avais pas fait de plan spécial car tu ne peux ni laisser une joueuse faire ce qu’elle veut, ni te focaliser uniquement sur elle.

Lucie : Moi, il me semble que l’on s’est aussi affronté en match amical quand j’étais à Bourg-de-Péage. Et qu’il n’y a rien de tel que de gagner face à son père (sourire) !

On peut se chambrer entre père et filles comme ça ?

Sébastien : Oui. Chez nous, ça chambre gentiment. C’est bienveillant et sympa !

Puisque l’on a compris qu’il n’y avait pas que le jeu à 7 chez les Modenel, de quoi est-il question quand on ne parle pas de hand ?

Lucie : Quand je suis avec ma sœur, elle m’emmène faire du shopping, on passe juste du bon temps ensemble, avec nos amis du pôle, à Clermont. On se parle beaucoup de la vie en général et parfois aussi de handball. Avec ma formation, j’ai essayé de lui donner des conseils pour sa rééducation notamment. Et avec mes parents, on aime bien faire des jeux, aller dans la nature, se promener

Sébastien : C’est difficile de trouver des moments en commun. Mais quand on peut, on essaye d’avoir 4/5 jours pour partir en vacances ensemble. Soit au soleil, soit à la montagne. Détente. On essaye aussi de se retrouver sur des matchs de haut-niveau car c’est notre passion. Sinon on profite de la nature, tous ensemble.

S’il fallait retenir une qualité de l’autre ?

Sébastien : Lucie a toujours été une gamine qui ne s’arrêtait jamais. Soit elle est à 100 %, soit elle n’existe pas. Elle est « crue », à fond, elle donne tout et a besoin de cela pour être performante. Enfant, dès qu’on la voyait plus, c’est qu’elle s’était endormie sur un tapis ou dans un coin.

Lucie : Sa plus grosse qualité, c’est qu’il est très exigeant mais dans le bon sens du terme. Il veut toujours aider la personne en face de lui. Il va toujours trouver le moyen de faire évoluer la personne même si parfois il a besoin de trouver la bonne façon de le dire.