« Sportives et Cycles menstruels », retour sur l’atelier organisé avec le Metz Handball

Dans la continuité du talk organisé avec des experts et des handballeuses en novembre 2022, la Ligue féminine de Handball et son nouveau partenaire majeur depuis la rentrée 2022, Lidl France, lancent, sur tout le territoire, la deuxième phase d’activation de la saison sur le thème des « cycles menstruels dans le sport ». Les clubs de Ligue Butagaz Énergie, vont organiser, entre début mars et fin mai, des ateliers de sensibilisation auprès de jeunes joueuses dans les centres de formation, les collèges et universités. L’objectif est d’échanger sur cette thématique des menstruations, encore trop « tabou » chez les joueuses et leur staff, et d’analyser les conséquences, avec des études précises, sur les performances sportives. Le deuxième atelier s’est déroulé cette semaine avec le club de Metz Handball, en présence de Camille Depuiset (joueuse professionnelle) et de Vanessa Khalfa (responsable de la LFH) qui sont intervenues auprès des jeunes joueuses U16 du Metz Handball, accompagnées par leur entraîneur Olivier Ghisu.

L’entretien de l’ambassadrice avec Camille depuiset

  • 84 % des sportives vivent leurs règles comme des difficultés (étude faite par le ministère des sports), parmi elles 23 % ont du mal à en parler à leur staff médical. Est-ce que c’est votre cas ?  

C’est moins mon cas, mais ça a été mon cas parce qu’il y a quelques années c’est vrai qu’on parlait beaucoup moins du fait de peut-être adapter l’entraînement, parce qu’on se sent fatigué, parce qu’on a nos règles, parce qu’on ne le disait pas et voilà. Maintenant, en tout cas ici à Metz, on a la chance d’être libre, de parler de ce sujet là et de pouvoir justement avoir des moyens mis en place pour qu’on puisse un peu libérer la parole et adapter notre entraînement si besoin pour éviter tout risque de surmenage, de blessure etc.

  • On parle souvent de performance, Est-ce que pour toi ces périodes-là ont un impact sur la performance ?  

Quelquefois je me sens plus fatigué, donc forcément si j’ai moins d’énergie, je me dis que peut-être je suis moins performante, maintenant j’apprends et j’essaie de continuer à apprendre à gérer ça et du coup à gérer mon corps pendant ces périodes pour faire en sorte de baisser le moins possible mon niveau des performances. Il y a forcément des choses inévitables, comme la fatigue, les douleurs, les maux de ventre qui vont faire que tu te sens moins bien sur le match aujourd’hui parce que tu as tes règles.

  1. Est-ce que pour vous l’initiative de la LFH et de LIDL est un bon début pour aller encore plus loin afin de toucher au-delà des sportives de haut niveau, les jeunes sportives et qu’elles puissent être informées ? En d’autres termes pour toi quelles pourrait être les choses à mettre en place pour sensibiliser davantage ces jeunes sportives ?  

Je trouve l’initiative vraiment superbe parce que ça permet aussi, à l’échelle nationale, de pouvoir en parler et aussi pour certaines jeunes filles de peut-être leur faire découvrir certaines choses et de leur faire comprendre « pourquoi » et « comment » elles peuvent régler certaines problématiques qu’elles ont, comme le fait de vraiment en parler, soit entre elles soit avec leur coach et surtout d’écouter leurs corps. Moi-même j’ai appris pas mal de choses que j’aurais peut-être aussi aimé apprendre il y a dix ans quand j’avais leur âge. Si à l’heure actuelle la LFH et LIDL peuvent aider un peu à briser les tabous, libérer la parole et faire en sorte que des femmes se sentent mieux plus tard, je suis ravie de les aider.

L’entretien de l’entraîneur avec Olivier Ghisu (responsable des U16)

  1. Vous entraînez une équipe féminine, comment appréhendez-vous ce sujet et comment en discutez-vous avec vos joueuses ?

Je coache des filles depuis plusieurs années mais c’est ma première année à Metz Handball chez les -16F. Personnellement je n’ai aucun problème ou aucune gêne si je devais aborder ce sujet avec les joueuses. Papa de deux filles dont une qui a leur âge je saurais répondre à leurs interrogations. Toutefois on ne se connaît pas encore assez et je pense que les filles n’osent pas aborder ce sujet avec moi pour le moment, suite à l’intervention d’hier les choses vont sûrement bouger. On n’a pas qu’un rôle de transmission de savoir-faire, on a surtout un rôle éducatif avec ces jeunes joueuses. Elles savent maintenant que je peux aussi être une oreille attentive et qu’on peut aborder ce genre de sujet en toute simplicité

  1. Est-ce que ce genre de sujet est également pris en compte lors de vos formations d’entraineurs ?

Moi qui ai la double casquette et qui ai eu la chance d’être en formation au foot et au hand je vais pouvoir comparer. Au niveau du foot on a eu une intervention sur cette thématique, au niveau du handball je n’ai pas le souvenir. Sûrement que c’est fait sur le module de préparation physique que je n’ai pas suivi cette année. Je pense qu’il faudra à l’avenir l’intégrer dans la formation globale.

  1. Comment abordez-vous cela avec vos joueuses et est-ce que vous mettez en place des aménagements pour les joueuses en fonction de leurs cycles menstruels ?

Dans le club je ne me prononcerai pas pour les autres mais dans ma catégorie rien n’était mis en place pour le moment. Je ne connais les filles que depuis le début de saison et d’autres aspects ont été priorisés. Les questionnaires et/ou les différentes applications existantes peuvent être une bonne piste de travail à prévoir pour les saisons à venir. En ce qui concerne l’état de forme des joueuses c’est très subjectif cette année car je ne les connais pas assez, même si à l’heure actuelle je serais en capacité de détecter des méformes sans pour autant faire une corrélation avec les menstruations. Il serait intéressant de pouvoir planifier les différents cycles des joueuses afin d’adapter la charge de travail, réduire la charge ou l’augmenter selon la période du cycle où se trouve la joueuse. En tout cas c’est un sujet hyper intéressant pour un coach masculin qui encadre des jeunes filles. J’ai senti les filles hyper attentives et intéressées par le sujet. J’espère  qu’on pourra les faire progresser davantage en prendre en compte les menstruations. Belle initiative bravo !

L’entretien avec deux jeunes joueuses U16 du club (anonyme)

  1. Pour commencer, est-ce que dans ta vie sportive et de manière générale, tu te sens à l’aise avec ce sujet, parles en tu facilement ?  

E : Moi, personnellement je n’ai aucun problème avec ça. Après, je n’en ai pas forcément déjà parlé avec mes coachs parce que ce n’était pas nécessaire mais ce n’est pas quelque chose qui me dérangerait.

J : A la maison ce n’est pas un sujet tabou, mais je trouve quand même que c’est gênant de parler de ça. En sport, si je me sens vraiment pas bien je suis prête à en parler à mes copines.

  1. Le fait de recevoir des informations concrètent et de pouvoir en parler avec une joueuse professionnelle, est-ce que cela te permet d’être plus à l’aise pour en parler par la suite ?  

: L’intervention était bien car elle nous a un peu décoincé et nous a permis de comprendre qu’on est toutes pareilles. On n’ose pas forcément en parler alors qu’on partage toute le même problème, alors ça nous aide quand même.

J : J’ai trouvé que c’était super parce qu’on avait deux âges différents avec Camille jeune et sportive et de l’autre Vanessa qui est une adulte avec plus d’expérience que nous. C’était enrichissant.

  1. Pour finir, comment as-tu trouvé ces moments d’échanges et pensais-tu que LIDL et la Ligue féminine pouvaient être associer à ce genre de sujet un peu particulier ?  

 E : Je n’avais jamais pensé que ces interventions-là existaient et qu’on pourrait mélanger le sport et les règles. Et c’est vrai que c’est super intelligent parce qu’on est concerné, ça nous aide à en parler et adapter nos entraînements.

J : Je pensais aussi que le sport et les règles n’avaient rien en commun mais finalement après cette intervention on se rend compte que si, que ça peut affecter nos humeurs, nos qualités, etc. La Ligue Féminine de Handball et LIDL ont eu une bonne intention de faire ça.

(photos : CEDOSA / METZ)